Le Portugal risque de mettre un terme à son programme de « visas dorés »

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Publié le 2022-11-15 à 06:26
Le Portugal procède actuellement à une refonte de son système de visas. En juillet, les réformes apportées à la loi de l'immigration ont créé un visa de demandeur d'emploi de 120 jours pour les ressortissants de pays tiers qui sont à la recherche d'un emploi dans le pays. Début novembre, le Premier ministre a également annoncé que le controversé « Golden Visa » pourrait bientôt être supprimé. Des discussions sont actuellement en cours.

Le Premier ministre Costa affirme que le « Golden Visa » a déjà rempli sa fonction

En seulement une décennie (2012-2022), le système du « Golden Visa » a permis d'injecter 5,87 milliards d'euros dans l'économie portugaise par le biais d'investissements immobiliers. Aujourd'hui, le Premier ministre portugais, António Costa, affirme que le système a déjà atteint ses objectifs financiers et qu'il ne sera bientôt plus nécessaire. Il semble que le pays veuille se concentrer sur des visas moins controversés, comme le Visa Nomade Numérique et le tout nouveau « Jobseeker Visa », et éviter les problèmes juridiques que le « Golden Visa » peut entraîner.

Pourquoi le « Golden Visa » était-il si controversé à l'origine ? La Commission européenne (CE) s'est fermement opposée aux « Golden Visas » dans tous les pays de l'UE. Suite à la pression de la CE, la Bulgarie a mis fin à son « Golden Visa » en avril 2022, et en septembre, Chypre lui a emboîté le pas. Le même mois, la Commission européenne a annoncé qu'elle allait poursuivre Malte en justice pour violation de la législation européenne par son « Golden Visa ».

La Commission européenne estime que la citoyenneté européenne ne devrait pas être « achetée » par le biais des voies rapides telles que le « Golden Visa ». En effet, il s'agit du seul type de visa dans l'UE dont les critères d'éligibilité sont purement financiers. En investissant 500 000 euros dans l'immobilier, les expatriés non européens peuvent devenir résidents portugais et bénéficier de la liberté de circulation dans l'ensemble de l'espace Schengen.

Les titulaires d'un « Golden Visa » peuvent demander la citoyenneté après 5 ans, comme le reste des expatriés. Mais voici la différence majeure : il leur suffit d'avoir séjourné dans le pays pendant 7 jours par an pour pouvoir prétendre à la citoyenneté. Cela ne représente qu'un peu plus d'un mois sur cinq années complètes. Aux yeux de la Commission européenne, il s'agit d'un raccourci qui est « répréhensible d'un point de vue éthique, juridique et économique. » Il se peut que ces expatriés soient à peine restés au Portugal et qu'ils n'aient pas du tout été des personnes actives et culturellement intégrées à sa société.

En outre, la Commission européenne a tiré la sonnette d'alarme sur le fait que le processus de demande de « Golden Visa » ne filtre pas suffisamment les antécédents criminels de ces ultras riches. En septembre, par exemple, il a été découvert qu'un résident chinois du Portugal titulaire d'un « Golden Visa », Feng Shen, était en fait un ancien détenu en Chine qui avait réussi à obtenir le visa en utilisant de faux justificatifs. Il y a également peu de contrôle quant à l'évasion fiscale et le blanchiment d'argent qui peuvent être commis par les milliardaires étrangers qui transfèrent leur fortune dans l'immobilier portugais via le « Golden Visa ». Dans une tentative de rendre le processus de sélection plus éthique, le Portugal a interdit aux milliardaires russes et biélorusses de demander le visa lorsque la Russie a envahi l'Ukraine en mars 2022. C'était un moyen de s'assurer que ses lois locales n'étaient pas en contradiction avec les sanctions de l'Union européenne à l'encontre de la Russie.

Cependant, les demandeurs russes/biélorusses ne représentent qu'une minorité de tous les demandeurs de « Golden Visa ». La moitié des détenteurs de « Golden Visa » sont des Chinois, suivis des Brésiliens, Sud-Africains, Turcs, Américains et Angolais fortunés. Leurs visas présentent toujours un risque juridique. Pour éviter d'être traîné devant la Cour européenne de justice comme Malte, le Portugal semble désormais préférer mettre un terme à ce visa.

Le nouveau « Jobseeker Visa » facilite l'immigration des expatriés non européens

Au lieu de maintenir le « Golden Visa » qui représente un risque considérable, le Portugal oriente désormais ses ressources vers la création et le renforcement d'autres visas dont les exigences ne sont pas purement financières. En octobre, il a commencé à accepter les demandes de Visa de nomade numérique. Et quelques mois auparavant, fin juillet, le Portugal a revu sa loi sur l'immigration dans son ensemble. Parmi ces réformes figure la création d'un nouveau visa de demandeur d'emploi.

Qu'est-ce que le visa de demandeur d'emploi ? Les ressortissants étrangers, notamment les expatriés non européens qui ne bénéficient pas de la liberté de circulation dans la région, peuvent utiliser ce visa pour demeurer pendant 120 jours au Portugal et y chercher un emploi. Ils peuvent le prolonger de 60 jours supplémentaires s'ils n'ont pas encore trouvé d'emploi. Ceux qui réussissent dans leur quête peuvent commencer à travailler immédiatement et se verront accorder le statut de résident basé sur l'emploi. Leur famille pourra également les rejoindre. Quant aux demandeurs d'emploi déboutés, ils devront quitter le pays à la date d'expiration du visa. Ils ne seront pas autorisés à entrer à nouveau au Portugal ni à déposer une nouvelle demande de visa de demandeur d'emploi avant un an.

Les autorités portugaises ont clairement indiqué que les titulaires d'un visa de demandeur d'emploi ne pourront pas voyager en dehors du Portugal ni chercher un emploi dans d'autres pays de l'espace Schengen pendant leur séjour de 120 jours (ou 180 jours). Ils devront également prouver qu'ils disposent des fonds nécessaires pour couvrir leurs dépenses pendant leur séjour et d'un billet de retour au cas où ils ne trouveraient pas un emploi.